La mauvaise réputation

C'était une sorte de pèlerinage qui avait ramené Dean à ce fameux pub irlandais, ou tout du moins à ce qu'il en restait. C'était plus impressionnant en vrai qu'en photo. Dire qu'il avait été l'un des derniers à le voir encore en bon état... Non que cela l'émeuve outre mesure, le pub avait été une idée d'un de ses comparses, et il n'avait jamais adhéré à ces atmosphères de mousse de bières et d'éructations subséquentes.

Ça lui rappelait trop Ryan.

L'objectif dans l'affaire n'était pas tant de voir par lui-même qu'aussi un peu s'y faire voir. Il n'avait certes pas l'intention de s'aventurer au delà des lignes de police, mais quitte à avoir l'air d'un anti-mutant, autant essayer de s'intéresser à ce qu'ils faisaient. C'était pas mal. Du beau casse. Mais un mutant aurait fait ça tout seul, songea-t-il en affichant une moue d'approbation.

Sa cible était ailleurs. Une sorte de QG des casseurs. Peut-être n'était-ce même pas les coupables de l'ablation d'un pub irlandais de Manhattan, mais ils paieraient aussi bien pour les autres. D'après le geek, un truc d'amateurs de cuir... Ils se contenteraient du jean qu'il avait mis, avec une chemise assortie, et des baskets. Les santiags, ça faisait vraiment trop redneck, et il fallait garder un minimum de classe. Et c'était mieux pour courir.

Il se promena un peu, cherchant les affichettes des magasins hostiles aux mutants, les contemplant un instant pour s'y faire voir, sur les épiceries, les bistrots... Le Joan Jett's... Ce n'était pas celui là... Le Blackheart's... Dieu que c'était kitsch... Et finalement, le Joe's Bar.

Un grand comptoir de bois foncé... Acajou, ou bien juste crasse ? Une collection de verres, de bouteilles de bière, photos de motos, de pépées de mauvais goût, alcools divers, billards, fléchettes, et public assorti, faits de balourds grisonnants, d'hommes dans la force de l'âge complotant et roulant des mécaniques tatouées devant des bimbos conquises, et d'autres plus jeunes -peut être même l'âge de Dean- essayant d'imiter leurs modèles, dans une quête de gloire et de reconnaissance.

*La parfaite verrue sociale à traiter de la manière forte*, songea-t-il tout en s'accoudant au bar, et commandant une bière noire sirupeuse et riche en alcool.

Dean jeta un regard consterné à Alban.

*Bonjour la discrétion... Il veut pas me demander où j'ai planqué la bombe, tant qu'il y est ?*, songea-t-il, avant de répondre à Alban, d'un ton acerbe.

"Il y a une enseigne, et figure toi qu'on sait lire aussi sur la Côte Ouest..."

Il sirota un instant sa bière qui, sans être dégeulasse ni mauvais jeu de mot, n'était pas sa tasse de thé, puis compléta.

"Et je sais suffisamment me tenir pour ne pas m'attirer inutilement des problèmes."

Une bonne demi-heure plus tard, comme il était convenu, Ethan approcha du bar.
Il s'était habillé du vieux jogging délavé et avait adopté une posture courbée, mal assurée. Il s'était entrainer tout la soirée devant le miroir, pour paraitre moins costaux et avoir l'air moins sur de lui. L'exercice n'était pas évidant, mais il était assez fier de ça performance et pensait être suffisamment crédible. En chemin, il avait acheté plusieurs roses emballées séparément d'un film plastique.

Il allait devoir se faire passer pour un vendeur de rose qui est entré au mauvais endroit, c'était souvent la coutume chez les vendeurs d'amour d'entrer n'importe où. Généralement, ils venaient d'arriver dans le pays et ne connaissait pas encore bien la ville, où alors les cartiers intéressant étaient occupés par la concurrence. La couverture était parfaite, Ethan le savait, mais il savait aussi qu'il allait se faire lyncher, que ça salle gueule n'allait pas revenir au mec du bar, il qu'il devait se retenir de rendre les coups. Mais il espérait vraiment que se soient ses collèges qui le passent à tabac, ainsi ils s'infiltreraient plus facilement dans le club très fermer des connards et le mutant vert n'aurait pas fait tout ceci pour rien.

A peine entré dans le bar il s'approcha d'une table, s'en faire attention à ses collègues installer un peu plus loin et proposa ses roses aux premières personnes qu'il croisa en forcent sur son accent espagnol.

"Bönjour, des roses pour l'amour?"

Il avait dit ça timidement, comme s'il n'était pas à l'aise, mais au fond de lui il avait envie de rire tellement la situation était grotesque.