[Courtier Dean Casely]Relax Teenagers à Beverly Hills

Le policier, contre toute attente, n’était ni un gros bouffeur de beignets, ni une femme bourrée d’hormones. À l’apparition de Dean, il se présenta d’un ton formaliste.


« Inspecteur Josh Hogan. Je viens vous poser quelques questions sur la soirée qui a eu lieu hier, chez Mademoiselle Brenda Richardson. Vous êtes… vous êtes le premier survivant de l’incendie que je croise, depuis ce matin. »

Il avait ralenti la cadence de ses mots, comme pour que Dean accuse plus facilement le coup.

« Le second que je sais vivant. Mais le premier, Tony Bryanson, ne saura pas nous aider pour le moment. Il a été conduit cette nuit à l’hôpital, grièvement brûlé. »

Il marqua une pause pour changer de position, plaçant ses mains derrière son dos, croisées

« Vous étiez à cette fête, n’est-ce pas ? » C’était une question rhétorique. Il poursuivit. « Y étiez-vous encore lorsque l’incendie s’est déclaré ? »

Correction, le policier avait un peu d'allure. Peut-être survivrait-il à la réforme d'épuration qu'il entreprendrait quand il serait aux manettes... Évidemment, sa visite avait trait à la soirée. La fameuse soirée. Il allait falloir jouer serré.

"Ah euh...", Dean prit l'air gêné, à raison d'ailleurs, même si ce n'était peut-être pas pour celles que l'inspecteur pouvait s'imaginer. "Entrez, suivez-moi..."

Il le conduisit au salon où il s'installa, tout en réfléchissant. Le premier survivant, et le second vivant. Ce qui veut dire que la fille rousse s'était taillée et n'avait pas été retrouvée. Tony était grièvement brûlé, c'était signé. Sauf que ce n'était pas de lui que venait l'info. Donc, qui avait balancé ? Son portable ! Ça ne pouvait être que cela. Dean prit une profonde inspiration.

"Oui, j'y étais... Je ne sais plus très bien ce qui s'est passé, j'avais un peu bu...", expliqua-t-il comme pour s'excuser par avance des incohérences du récit parcellaire qu'il allait inventer. "Je me rappelle de Tony, on avait joué à un jeu à boire. Et c'est à la fin que j'ai vu que la maison brûlait. J'ai voulu prendre mon portable, pour appeler du secours, et je ne sais pas ce que j'ai bricolé avec...", il ne compléta pas sa phrase, n'étant pas très sûr de l'état dans lequel cet accessoire avait été retrouvé.

"En tout cas, comme je n'y pouvais rien, j'ai pris peur, et je me suis sauvé. Je ne comprends pas ce qui est arrivé à Tony. Quand je suis parti, je crois qu'il était encore dans la piscine."

Il prit finalement sa tête dans ses mains, espérant que toute son histoire se tenait.

Voyant que Dean avait sans doute des informations pour lui, le policier le suivit à l’intérieur de la maison, et s’installa dans un fauteuil en face du mutant. Il avait un petit calepin à la main, et prenait quelques notes à mesure que Dean parlait.

« Je passerai sur l’interdiction aux moins de 21 ans de consommer de l’alcool. Mais jeune homme, j’espère que vous tirerez une leçon de tout ceci. »

Il tira d’une pochette qu’il portait en bandoulière un petit sachet contenant le téléphone de Dean.

« Est-ce votre portable ? »

Il avait un air grave. Il faut dire, la situation s’y prêtait. De nombreux morts, cette nuit, dans la maison de Brenda. Même s’il n’avait pas l’air de suspecter un incendie criminel.

« Avez-vous remarqué quoi que ce soit d’anormal, avant l’incendie ? Avant votre jeu avec Tony ? Saviez-vous ce que faisaient les autres jeunes ? »

Et puis, il revint sur le cas de Tony.

« Les pompiers ont retrouvé monsieur Bryanson en état d’ébriété avancée. Il était trempé, et c’est sans doute ce qui l’a sauvé des flammes. Apparemment, il tentait de pénétrer dans la maison en flamme. Peut-être pour secourir ses congénères… Nous ne le saurons que lorsque son état se sera stabilisé. »

Oui, évidemment, la légalité de la consommation d'alcool à son âge était discutable, même si au final, il y avait bien d'autres cachotteries à faire. Un instant, il fut tenté de lui servir le pathétique discours de "vous avez été jeune vous aussi" ou bien de "il faut s'amuser tant qu'on peut" ou encore "je souhaite profiter de la vie", mais finalement, ce serait dégradant, et verser dans ce genre de pathos n'en valait pas la chandelle, vu que son histoire avait, semblait-il, fonctionné.

Le portable, donc, c'était bien lui. Dean hocha la tête en reconnaissant sa merveille dernier cri.

"Oui, c'est mon portable... Je sais que je voulais faire le 911, et puis j'ai eu l'impression qu'il me chauffait la main ou qu'il allait exploser... Je ne sais plus très bien, c'était très confus."

Quelque chose d'anormal... Oui, il y avait la fameuse fille rousse, sauf qu'il ne savait pas son nom. Même s'il était évident qu'elle était à l'origine de ce carnage, Dean n'avait pas non plus envie de la balancer. Non qu'il approuvait la mort de plein de jeunes et l'incendie d'une maison d'architecte, mais il préférait régler ces choses là à sa façon. Et de toutes façons, il ne savait pas comment elle s'appelait, alors.

"Je ne sais plus trop. Je n'étais pas vraiment dans la soirée. Tout le monde avait bien bu, et probablement un peu plus, si vous voulez mon avis, mais je ne touche pas à ça. Il y avait du monde un peu partout, je crois que Brenda faisait un genre de strip-tease, ou des choses comme ça. Comme dans toutes les soirées branchées en fait : de l'alcool, de la drogue, et du sexe.", essayait-il de se remémorer. Il n'avait pas vraiment besoin de théâtraliser la chose : il n'aimait à la base pas la soirée, et n'avait pas prêté attention à ce que les autres faisaient. Dans tous les cas, il n'était pas feint qu'il désapprouvait ces comportements excessivement désinvoltes.

"Je ne saurai pas vous dire s'il y avait quelque chose de bizarre, ou bien des gens bizarres... Je ne connaissais pas tout le monde. Quoique, si... Je me souviens d'un truc. Quand Tony a sauté dans la piscine, on était les derniers encore dehors. Tout le monde était rentré. C'est un peu plus tard que..." il laissa un blanc, meublé par la perspective d'un ravageur incendie.

Le policier parut troublé de l’apparente honnêteté de la déclaration de Dean. De sa franchise, tout au moins, concernant les pratiques – connues de tous - de ces jeunes bourgeois de Beverly Hills. Il sembla même gêné de n’avoir pas plus de question à lui poser.

« Bon… Je vous remercie pour votre collaboration. Nous vous recontacterons sans doute plus tard, veuillez ne pas quitter la ville d’ici là. Le temps que nous voyions si votre témoignage correspond à celui de Tony Bryanson. »

Il se leva.

« Je vais vous laisser. Si un autre détail vous reviendrait, quel qu’il soit, contactez-moi. »

Et il tendit sa carte au jeune mutant…

Dean prit la carte, la regardant attentivement tout en réfléchissant. Ne pas quitter la ville était un ordre classique, mais c'était ennuyeux. Il fallait qu'il se mette au vert pour retrouver la folle pyromane, mais surtout pour mettre un peu d'ordre dans ses idées. Ce ne serait pas du luxe.

Puis il réalisa : si Tony s'en sortait, il allait probablement se souvenir de certains détails troublants qui n'allaient pas jouer à son avantage.

Dean se leva pour raccompagner le policier, tout en demandant :

"Vous savez à quel hôpital se trouve Tony ? Je voudrais... je sais pas... le voir ? Je me suis tiré pour sauver ma peau, et je n'ai même pas pensé à l'aider..."

Mais une autre question lui brûlait aussi les lèvres, pour rester dans le champ lexical de l'incendie :

"Dites... Vous croyez que c'était un incendie criminel ? Ou bien c'est juste une soirée trop pleine d'excès qui aurait... mal fini..."

Le policier suivit Dean jusqu’à la porte, puis le regarda avec une grimace désolée.

« Je crains que vous ne puissiez lui rendre visite, malgré l’amitié que vous lui témoignez. Il a été transféré au Bellevue Hospital, à Manhattan, New-York. Ses parents travaillent là-bas, et ils ont préféré le garder près d’eux pour les soins qu’il doit subir. »

Comme pour s’excuser d’une nouvelle décevante, il précisa :

« Mais nous vous communiquerons prochainement l’évolution de son état, n’ayez crainte. »

Et puis, il répondit à ta question en se grattant l’arrière de la tête.

« Je l’ignore. Nous devons envisager toutes les possibilités, mais aucune ne prévaut actuellement. C’est pour cette raison que j’enquête. Pour savoir. Bonne journée, jeune homme. Si vous avez besoin d’une aide psychologique, la police de Beverly Hills est prête à vous en fournir une, sur demande. »

Et il s’en alla vers sa voiture, laissant Dean seul avec ses pensées sur le pas de sa porte.

Dean hocha la tête aux réponses du flic. Un brave type. Il aurait la vie sauve. Il le regarda s'éloigner, restant sur le seuil de la porte, plongé dans ses réflexions.

Tony avait été expédié à Manhattan. C'est donc là-bas qu'il fallait aller s'il voulait régler la question définitivement, tout en délivrant l'humanité d'un parasite sans intérêt. Est-ce que ce serait compliqué ? Il aviserait sur place...
Ce qui était ennuyeux, c'est qu'il n'était pas censé quitter Los Angeles. Et donc, il risquait très fort de se mettre la police locale à dos. D'un autre coté, les policiers n'étaient rien de plus que des fonctionnaires, probablement aisément corruptible, et qui malgré leurs grands airs avaient souvent du mal à franchir le mur de l'argent. Même si ce policier lui avait paru sympathique, la police en elle-même se plaçait maintenant dans la position d'adversaire, et il fallait donc faire abstraction du reste.

Sa décisions est prise, il partait à New-York. Bien que... Avant d'aller à New-York, il fallait d'abord trouver sa mère, pour lui servir une histoire crédible.

"Je vais me mettre au vert. Après tout ça, j'ai besoin d'être un peu au calme et d'avoir la paix. La police ne veut pas que je quitte la ville, et je n'ai pas du tout l'intention de faire ce qu'elle demande. Je leur ai dit tout ce que je savais, s'ils reviennent pour me voir, envoie leur les avocats, ça les amusera."

Ce n'était pas vraiment une demande, ni trop un ordre. Sa mère comprendrait probablement. Pour la suite, il fallait faire un minimum de prévisions.

Tout en préparant ses bagages les plus urgents, il faisait l'inventaire de ses besoins essentiels : un pilote privé compréhensif qui accepterait d'être payé en liquide sans trop poser de questions et ainsi éviter les gueux dans les transports en commun ; du liquide ; une carte de crédit d'un paradis fiscal de ses parents, pour ne pas être traqué par ce biais...

*Il y a certaines personnes qui s'achètent avec du liquide. Pour tout le reste, il y a des cartes de crédit.*, songeait-il, tout affairé à ses préparatifs qu'il était.

Dean parvint à trouver tant bien que mal tout ce qu’il lui fallait pour se rendre à New-York, et arriva dans la grande ville sans encombre, preuve que le service policier de son patelin n’était peut-être pas aussi efficace qu’il y paraissait. Il savait néanmoins que désormais, il serait le suspect n°1 si la voie criminelle était choisie pour expliquer l’incendie…

Dean n’eut aucun mal non plus à trouver l’hôpital Bellevue, dans le centre de Manhattan. Il était devant l’entrée du bâtiment, ignorant le n° de la chambre du gros Tony.